– Payne ne fait plus de concert pour le moment, j’ai cessé la diffusion des disques en France ... parce qu’on n’y a jamais mis les pieds pour jouer ... J’ai cessé la diffusion en Belgique parce qu’ils considéraient le disque... comme un import ... Donc c’est chez moi, et si quelqu’un en désire un, je me ferai un plaisir de faire un envoi.
– Kijé est enfin visible sur vimeo, il ne reste plus que quelques exemplaires de la publication soit sur le stand de la 5C quand vous les croisez, soit... chez moi, à côté des disques. :)
– Un film arrivera en ce début d’année, promis juré, je le termine.
– Une bd va même finir par pointer son nez, mais ça ne sera pas pour 2020 je pense. En attendant, je raconte des mini histoires en bd dans une série de fanzines.
Il existe pour le moment deux numéros d’une 20aine de pages, ça s’appelle "N’en parlons pas", mais j’en parle un peu quand même voilà.
– Je continue la musique, soit pour faire du classique, soit pour faire des conneries. Ce devrait nourrir l’envie de continuer/recommencer un truc à un moment avec mon ami Corentin par exemple. En attendant je m’amuse toujours autant. Ici, un kit en préparation pour une prochaine petite intervention, avec des reprises de chansons fâchées. Plus d’info à venir...
Il y a 6 ans je terminais Kijé, je n’ai pas validé ce texte sur le moment.
Aujourd’hui, on pense enfin à balancer "Kijé" en ligne. Il était temps !
Récapitulons.
(janvier 2013)
J’ai fait mon premier concert, j’ai arrêté de prendre un contraceptif, j’ai découvert une partie du Liban et puis une partie du Québec, j’ai dit oui pour un projet de collectif en bande dessinée, j’ai planché sur un scénario pour un autre projet de bande dessinée, j’ai fait un planning digne de ce nom pour terminer "Kijé" en 2013, j’ai composé de nouvelles choses pour d’autres personne et ça m’a bien plu, j’ai passé quelques heures à enseigner dans une école supérieure d’art, j’ai raconté des conneries à la radio, j’ai moins pleuré je trouve, j’ai envoyé chier mon psy quand il m’a proposé de prendre des anti-dépresseurs et je trouve que j’ai eu raison, je suis tombée enceinte, j’ai passé l’examen médical le plus stressant de ma vie. J’ai ressorti des partitions de Poulenc et de Prokofiev que j’ai abandonné il y a dix ans, en me disant que j’allais enfin les reprendre, mais je n’ose pas à cause des voisins, je ne suis toujours pas retournée écouter un orchestre symphonique, je n’ai toujours pas repris "histoire de la musique occidentale", ni tout les autres livres théoriques que j’ai rassemblé près de mon bureau, je continue de collecter des films sans toujours les regarder, je continue de me demander si j’ai vraiment envie de vivre à Bruxelles. J’ai trois cheveux blancs. J’ai eu trente ans, et avec : Live, un clavier maître et une carte son. Même si ce ne sont pas les idées qui manquent, je n’ai pas encore commencé à bosser avec. Je n’ai toujours pas fait de démo, mais j’aimerai bien refaire quelques concerts. Je prend des notes pour un nouveau projet dont j’ai surtout ... le titre.
J’ai terminé le plus gros de mon film, enfin, ça se sont les producteurs qui le disent parce que j’ai encore de gros doutes. J’ai rendu une 40aine de planches de bande dessinée, par contre. J’ai mis sur papier un projet pédagogique et j’ai eu l’occasion de le défendre deux semaines avant d’accoucher, mais ça n’a rien donné.
Et puis on est passé de deux à trois en quelques minutes sur un canapé.
J’ai découvert que je savais crier, j’ai constaté que mon cerveau était soudainement programmé pour piger du Marie Thirion, mais pas du Roland Barthes, je me suis dit "J’espère que ça va passer", j’ai arrêté d’écouter des disques, je me suis dit "J’espère que ça reviendra". J’ai passé trois mois sans toucher à aucun projet à me demander ce que j’étais capable de faire finalement de ma vie.
Vers la fin je me suis demandée si j’avais même ne serait-ce qu’envie de redémarrer quoique ce soit.
J’ai vu la fin du congé maternité arriver, j’ai envoyé des mails pour dire que je voulais faire ce boulot d’illustration dont on parlait l’hiver dernier, et que je voulais bien retenter un concert avant d’oublier les paroles, j’ai troqué mon agenda papier contre un agenda en ligne, j’ai adoré remonter sur mon vélo, j’ai constaté en revenant à l’atelier que cet endroit m’avait manqué. J’ai repris Kijé, mais avant ça j’ai dit oui pour faire un clip en animation. Comme ça n’était encore pas assez chaud, j’ai dit oui pour dessiner le disque aussi. J’ai arrêté de faire des plannings et je crois que ça n’a rien changé à mon efficacité. J’ai travaillé avec méthode et j’ai même fait un story-board que j’ai respecté. J’ai enfin commencé à jouer sur mon piano en plastique, j’ai répété pour jouer dans des petits endroits remplis de gens attentifs, j’ai expédié un concert devant des gens qui avaient l’air de s’ennuyer, pour apprendre qu’en fait ils avaient aimé.
J’ai remanié pour la enième fois Kijé pour tenter d’en faire quelque chose d’acceptable, j’arrive à admettre qu’il sera très très imparfait, mais ça ne m’empêche pas d’être complètement abattue quand le visionne dans son ensemble. J’ai découvert que maintenant quand j’en ai plein le dos, c’est pas juste une image. J’ai perdu beaucoup de cheveux et je pleure pas mal, mais plus pour les mêmes raisons. Je ris plusieurs minutes par jour avec un humain de 80 cm. 50% de mes discussions comporte le prénom de mon fils, ou le mot enfant, ou bébé... Ca me gêne mais je n’arrive pas à me contrôler. J’ai pris des cuites que je n’ai pas vu venir, normal je bois comme une débutante. Je ne vais plus au cinéma et pour ça, j’envie mes amis sans enfants.
J’ai détesté être à la fois invitée et chroniqueuse mais j’aime bien quand même quand je me rend compte qu’on comprend mon histoire. J’ai fait rire ma mère en redessinant la cuisine de mon enfance. J’ai aimé dédicacer des livres alors que j’ai toujours dit que j’étais contre. J’ai cru mourir de froid cet hiver alors que tout le monde s’accorde pour dire qu’il était plutôt doux. La déprime s’est repointée comme une vieille copine, et je me suis dit "merde, après tout ça, je repars à zéro ?". Je ne sais toujours pas si ma thyroïde part en sucette.
J’ai toujours été contre mais des fois j’aimerai bien la télé là, maintenant tout de suite. Je voudrais bien un jardin aussi, et une maison pour faire de la musique tranquille. Faute de bosser sérieusement Poulenc ou Prokofiev, je relis Satie en me disant "merde même ça je le joue mal". Sinon on a dit qu’on aimerait bien refaire un truc ensemble, ça ne se fait pas, mais vraiment j’aimerai bien. Je n’ai plus rien composé de neuf depuis plus d’un an, et du coup je me demande si c’est déjà fini ? Je pèse moins lourd que dans mes années lycées, mais j’ai une peau toujours aussi ingrate. J’ai réussi à lire quelques livres et j’ai adoré, mais "la dramaturgie" traîne toujours à côté de mon lit. Je continue de me réveiller le matin en me disant "t’as encore trop parlé".
J’ai toujours le statut d’artiste.
J’ai fait 8 minutes d’animation en 5 ans1/2. J’ai fait 4 minutes d’animation en deux mois.
Je commence à connaître le sentiment maintenant, mais quand je termine un truc c’est un peu la fin du monde, et c’est un sentiment tellement désagréable que je me demande si ça vaut vraiment la peine de s’imposer ça.
J’avais la tête dans guidon et je n’ai pas vu arriver la fin de Kijé. Mais c’est terminé.
Kijé from Atelier Zorobabel on Vimeo.
"C’est la maman de Soren ! Bonjour maman de Soren"
Alors que je marche vers la classe de mon fils, un écho se répercute sur des petites bouilles inconnues... Si moi je ne connais pas le nom des enfants de sa classe, chaque adulte ici, malgré le brouhaha apparent, est attentivement relié à un enfant de la cour.
Il y a une semaine, j’ai accepté de venir parler de mon métier à une classe de 3ème maternelle.
Oups me suis-je dit après coup, mais... quel métier au fait ?
La tête dans des cartons je me suis dit ensuite que bon, faute de pouvoir montrer mes livres, j’allais montrer ceux des autres, après tout, on est là pour s’amuser. Tiens en parlant de livre qui n’existe pas, je ferais bien de prendre des dessins un peu colorés...mmmh... mais j’en ai en plus !
Je vais faire simple : je vais expliquer que je dessine, et que pour gagner ma vie, je suis prof dans une école supérieure d’Art pour les jeunes adultes qui voudraient aussi dessiner. (cf joannalorho.tumblr.com), (cf Erg)
Retour dans la classe donc, et surprise !
Alors que je raconte l’histoire de Marzena Sowa - la scénariste d’un de mes livres qui n’existe pas -, je montre quelques dessins, une série de hiboux, des forêts, des gribouillis, des trucs relativement aboutis, je vois cette brochette d’enfants aux mines excitées, qui se pressent pour me désigner leurs hiboux préférés, survoltés par le moindre croquis d’écureuil ou de hérisson.
Merde me suis-je dit, ces dessins sont dans des cartons depuis 4 ans...
Qu’est-ce que je fous ?
Histoire de les voir encore rigoler un peu, j’envoie un film tiré d’un workshop d’animation mené avec des gosses. Mauvais fichier, gnnn c’est quoi ça ? Han, un film dont j’avais complètement oublié l’existence...
Grosse rigolade.
Je tente même de montrer un truc animé "aussi pour les grands, c’est moins rigolo...", regards en coin, non, ils suivent.... "oooh c’est beau madame".
(cf Loon-plage et cie...)
"Impressionnant" dit la maîtresse, "vous-même !" j’avais envie de dire à celle qui emmène en classe verte 30 gamins qui pissent encore dans leur culotte.
Puis la maîtresse aux enfants : "Vous avez vu il y a des métiers supers dans lesquels on fait ce qu’on aime, toute la journée !"
Voui, ouhla, est-ce que je rectifie ? Mmh non pas le temps tanpis.
C’est vrai que j’ai tout fait pour les laisser avec cette impression là, ok.
Et puis c’est vrai que j’ai de la chance.
Bon sur le retour, j’ai envie d’appeler Marzena et de lui promettre monts et merveilles, mais avant je réfléchis quand même au programme...
Bon, et alors qu’est-ce que je fous ?!
Oui, et surtout, Qu’est-ce que j’ai foutu depuis 4 ans ?
Et bien, pas RIEN en tout cas.
J’avais dit que j’y reviendrai.
Voilà, j’y reviens :
Le dernier signe d’activité sur le site, c’est la sortie d’un disque, il y a deux ans plus ou moins, printemps 2017, ça a l’air de rien, c’était plutôt confidentiel, mais ça m’a pris une énergie dingue, d’ici j’avoue, je ne me rappelle plus très bien pourquoi... En tout cas j’ai un peu dérouillé.
Et ensuite, ça ne s’est pas du tout calmé, parce qu’en même temps, on signait pour une maison construite en 1901, rénovée dans les années 80 et laissée à l’abandon depuis 2 ans je crois. Du coup, le temps de terminer l’année à l’école (cf le vrai taf), et nous voilà perchés sur des échafaudages à détapisser. Et ça c’était juste le début... C’est comme... les enfants par exemple, heureusement qu’on te raconte pas à l’avance comment ça va se passer parce que tu dis non c’est sûr. Et ce serait dommage. Ou pas. Donc on ne sait pas, on est pris dedans, et puis on encaisse. On porte, on compte, on fait des plans, on bosse, le jour, le soir, le weekend, en gérant des petits qui pissent encore dans leurs couches.
C’est aussi pile poil l’année où je passe de 4h à 12h de cours à l’école. Ahah. Et comme je suis ultra motivée, je construis des cours, des nouveaux intitulés tout ça. (cf le site su cours)
Quand je peux, il y a la radio, le truc de trop que j’aime trop.
Et puis quand même quelques concerts... (cf Payne )
Ah oui, j’oublie l’académie en piano classique, à bosser du Rachmaninov et du Poulenc. Tendinites VS Rachmaninov VS finir les travaux : j’ai un peu pleuré j’avoue.
Je mène quand même tout ce bordel jusqu’à la fin de l’année suivante, avec l’école, les jurys tout ça, bam.
Les travaux, ça dure, normal, bouffer de la poussière, croiser des ouvriers dans tes chiottes, payer des factures avec des sous que t’as pas...
Mais ça se termine. Et on est content de vivre enfin dans cette maison qu’on aime. Mais ça ne nous laisse pas super frais, de mon côté, j’ai le dos déglingué, les poignets en vrac et un mal à la tête en continu.
MAIS je me dis, voilà tu va enfin avoir du temps devant toi là , cooool !
Rentrée 2018, , nouvelle année, nouvelle vie, ouyeah !
À l’école je me retrouve avec plein d’étudiants, je suis flattée de les voir tous là, mais ça fait beaucoup.
Beaucoup oui. Mais ça ou autre chose, le problème, c’est que tout fait beaucoup quand on n’est pas reposé. En fait.
Je ne parle pas de se reposer de quelques semaines un peu speed, je parle d’une longue fatigue de compet’ doublée d’une bonne grosse fatigue morale.
Je pensais que ça allait passer, parce que je trouvais que ça allait plutôt bien : s’installer dans une maison que t’as retapé, avec ta petite famille, avoir un job qui te plaît, bosser des trucs qui te bottent - mmff quand tu peux -, avoir des vrai.e.s ami.e.s.... y’a plus frustrant comme vie.
Bref au fond, je sais pas tout à fait pourquoi, enfin si. À ce moment de ma vie où pour la première fois les choses apparaissent "à l’équilibre", voire idéales à peu de choses près. Où sous un soleil doux dans un petit jardin avec un café soudain je me dis "putain j’ai de la chance".
Je sais pas j’ai baissé la garde ? Parce qu’un peu soudainement aussi, tout s’est un peu effondré. Peut-être un espace enfin pour que"ça" soit là. Bref.
Il est venu un moment où c’était plus possible. Quoi ? Bah plus rien : Plus rien n’était possible. J’ai pleuré en continu, partout.
Trop démontée, trop vulnérable. Et aussi, trop en colère, trop fatiguée, et affaiblie, super angoissée, et je sais pas quoi encore. Mais tout en même temps. Et puis un contexte général parfois tellement anxiogène il faut le dire.
D’abord j’ai voulu un masque. Pour pouvoir continuer incognito. Et puis après j’ai voulu une retraite, longue. Seule. Arrêter le temps, ne plus voir personne, et tenter de ramasser tout ce qui venait de péter. Essayer de faire le point. Refaire le puzzle.
Du silence, à l’intérieur, autour. Plus de gens, plus d’enfants, plus d’agenda, plus de mail, ne plus exister, ou si, juste pour moi.
Bon, faute de prendre la retraite de mes rêves, j’ai pu m’arrêter. J’ai plus rien foutu, pas longtemps, 2-3 semaines. Non c’est pas vrai, j’ai lu, j’ai rangé, et j’ai dessiné. Et joué du piano. Mais au ralenti.
Je crois que j’ai une bonne capacité de résilience, mais là je me trompe peut-être encore.
Voilà. Donc j’ai failli tout jeter, j’ai tout gardé.
Tout ça pour ça ? Eh bah oui.
J’ai juste encore ralenti.